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Quand et comment faut-il rédiger les conditions générales de vente d’un NFT ? Dans la pratique, les NFT ou jetons non fongibles, représentent souvent des sortes de certificats de propriété portant sur des œuvres numériques. En détenir équivaudrait donc à être « authentifié » comme le propriétaire d’une musique, d’un dessin, d’un item de jeu vidéo, etc. Depuis 2021, ce phénomène a touché le grand public. En effet, on trouve de plus en plus de créateurs vendant leurs œuvres à travers des NFT, sur une des nombreuses marketplaces existantes. Or, peu de précautions juridiques sont prises à l’occasion de ces démarches… Les NFT sont généralement vendus sans contrat, bien que les investisseurs soient de plus en plus soucieux des droits que leur octroient leurs achats. Voyons dans quels cas les conditions générales de ventes d’un NFT doivent être rédigées, les mentions obligatoires, et ce qu’il serait avisé d’y inclure.

 

Qu’est-ce qu’un NFT ?

On appelle NFT (non-fungible tokens ou jetons non fongibles), des actifs numériques uniques existants, ne pouvant être échangés qu’au sein d’une blockchain (chaîne de blocs). Que veut dire jeton « non fongible » ? Les NFT sont des jetons « non-fongibles », car ils ne peuvent être indifféremment interchangés entre eux, contrairement aux jetons fongibles.

Quand faut-il rédiger les conditions générales de vente d’un NFT ?

Définition des CGV

Les conditions générales de vente ou CGV par définition, sont un contrat détaillant les modalités de vente d’un bien ou d’un service, en l’absence d’accords spécifiques.

Obligation de rédaction des CGV pesant sur le vendeur

Dans quel cas un vendeur est-il dans l’obligation de rédiger et de publier les CGV de son NFT ? Il est obligatoire de rédiger des conditions générales de vente, en cas de vente de NFT à titre professionnel. Ainsi, lorsqu’un vendeur est un entrepreneur ou une société, dont l’activité comprend notamment la vente de NFT, et qu’il agit dans ce cadre, il est soumis à cette obligation.

En effet, l’article L111-1 du Code de la consommation impose la rédaction de CGV au vendeur professionnel qui vend des NFT à un particulier consommateur. Un tel cas nécessite de rédiger certaines mentions obligatoires dans les CGV, destinées à protéger le consommateur.

Cas de l’acquéreur professionnel

L’article L441-1 du Code de commerce vise le cas de l’acheteur professionnel. Sur le fondement de cet article, le vendeur est tenu de communiquer les CGV à l’acquéreur professionnel qui en fait la demande.

Ainsi, dans de nombreux cas, la rédaction de CGV à l’occasion de la vente de NFT est obligatoire. Elle est de toute façon recommandable. En effet, elle permet à un investisseur de connaître précisément l’étendue des droits qu’il obtient, lorsqu’il achète un actif pouvant coûter plusieurs millions d’euros !

Pourquoi la loi impose-t-elle des mentions obligatoires aux CGV ?

Comme évoqué, la loi exige certaines mentions obligatoires dans les CGV pour protéger le consommateur. Prenons l’hypothèse la plus courante d’un vendeur professionnel qui vend ses NFT à des consommateurs. La loi française impose au vendeur de renseigner certaines informations sur le produit vendu. Ainsi, l’acheteur connaîtra les caractéristiques du produit qu’il achète, et son consentement sera donc éclairé.

Que doivent contenir les CGV des NFT ?

Appliquées aux NFT, les conditions générales de vente doivent contenir les éléments suivants :

L’identité du vendeur

La loi sur les conditions générales de vente impose au vendeur professionnel d’un bien de renseigner dans ses CGV, les informations relatives à :

  • « son identité,
  • ses coordonnées postales, téléphoniques et électroniques,
  • et à ses activités. »

Malgré le pseudonymat permis dans la blockchain, un vendeur de NFT devra donc dévoiler plus d’informations que sa simple adresse ethereum.

Les caractéristiques du NFT

Le vendeur doit donner des informations détaillées sur les caractéristiques du NFT qu’il vend. Outre les droits de propriété intellectuelle auxquels l’achat du NFT donne droit (sur lesquels nous reviendrons), il devra notamment décrire ses caractéristiques techniques :

  • à quel standard le NFT appartient-t-il ?
  • sur quelle blockchain est-il déployé ?
  • quelle est l’adresse de déploiement du smart contract (ou « contrat intelligent ») ?
  • sur quel site est stocké le média associé ?
  • à combien s’élèvent les royalties ?
  • combien de NFT y a-t-il en circulation ?
  • etc.

Les modalités d’acquisition du NFT

Le vendeur est également tenu de détailler les modalités d’acquisition du NFT. Il doit donc décrire les différentes étapes à suivre pour le générer (ou « minter » le NFT) via l’interface proposée (ou une marketplace). C’est essentiel, car l’expérience d’achat d’un NFT est particulière. En effet, il faut utiliser des outils spéciaux, et gérer des paramètres échappant au contrôle du vendeur. Tout le déroulé du processus d’achat devra donc :

  • être décrit précisément;
  • et être en conformité avec la loi (notamment avec l’article 1127-1 du Code civil, imposant au vendeur de permettre à l’acheteur de rectifier des erreurs).

Le prix du NFT

En outre, le vendeur doit évidemment renseigner le prix de vente du NFT. En l’occurrence, il s’agira du prix du « minting » du NFT (ou de génération du NFT) à partir du smart contract. Ce prix peut être exprimé en cryptomonnaie. Il faudra alors préciser qu’il ne comprendra pas les frais de gaz. C’est-à-dire les frais d’interaction avec la blockchain, qui fluctuent en fonction de son activité.

Le droit de rétractation

Le vendeur de NFT doit informer les acheteurs de l’existence ou non d’un droit de rétractation. Il s’agit de la possibilité de revenir sur la vente pendant un certain délai. Même si nous pensons qu’il pourrait écarter l’application de ce droit, en vertu de deux exceptions légales autorisées :

L’article L221-28, 13° du Code de la consommation

Cet article dispose que la fourniture de contenu numérique sur un support immatériel peut exonérer le vendeur de consentir un droit de rétractation à ses acheteurs :

  • dès lors que « l’exécution du contrat a commencé »,
  • après que l’acheteur ait donné son accord préalable, et renoncé expressément à son droit de rétractation. Cela impliquerait un formulaire comportant cette mention à faire cocher à l’acheteur.

On peut, en effet, considérer un NFT comme un contenu numérique (au même titre qu’un film, une musique, etc.), et donc que cette exception lui soit applicable.

L’article L221-28, 2° du Code de la consommation

Peut être exclue du droit de rétractation :

« la fourniture de biens dont le prix dépend de fluctuations sur le marché financier échappant au contrôle du professionnel et susceptibles de se produire pendant le délai de rétractation ».

On ne peut omettre, surtout actuellement, la nature spéculative de nombreux NFT, et donc de la haute volatilité de leur prix immédiatement après leur achat. Il serait donc arguable que certains NFT soient concernés par cette exception.

Les garanties légales

Le vendeur devra informer l’acheteur des garanties légales dont il dispose, et particulièrement de la garantie légale de conformité. Cette garantie permet à un consommateur, en cas de non-conformité d’un bien, de l’échanger pendant 2 ans à compter de son achat. Auparavant, la garantie légale de conformité s’appliquait uniquement aux biens physiques (neufs ou d’occasion). Mais depuis le 1er janvier 2022, l’ordonnance n° 2021-1247 l’étend également aux biens numériques. Elle pourrait donc très potentiellement s’appliquer aux NFT. Dans ce cas, l’émetteur serait avisé de restreindre le plus possible dans ses CGV la définition de la non-conformité.

La protection des données à caractère personnel

A priori, peu de données personnelles sont traitées par le vendeur à l’occasion de la vente de ses NFT :

  • l’adresse publique de l’acheteur,
  • et les informations associées (telles que son solde de tokens).

Le vendeur devra rédiger cette clause comme on rédige habituellement les clauses de protection de données personnelles, en étant transparent sur :

  • le traitement de données personnelles (finalité, données collectées, base légale, durée de traitement, etc.)
  • et sur les droits à la disposition des personnes concernées et leurs modalités d’exercice (les droits d’accès, et droits à la limitation du traitement, notamment).

L’obligation de recourir à un médiateur à la consommation

L’article L612-1 du Code de la consommation impose la désignation d’un médiateur. Il sera chargé de résoudre amiablement un litige éventuel entre un acheteur et un vendeur professionnel. Le vendeur devra alors choisir un médiateur (de préférence acculturé au domaine de la crypto), et informer sa clientèle de la possibilité d’y recourir.

NFT et propriété intellectuelle : quelles sont les dispositions spécifiques ?

La précision des droits cédés dans les CGV

Comme évoqué, le vendeur doit préciser les caractéristiques de son NFT. Et notamment, ce qu’il entend céder lorsqu’une personne achète son NFT.

Le NFT par exemple, peut porter sur une œuvre (telle qu’un dessin, une musique, un item de jeu vidéo, une photo, ou toute autre création originale). Or, les œuvres sont protégées par des droits d’auteurs. Et l’article L131-2 du Code de propriété intellectuelle dispose que leur cession doit être constatée par écrit.

Autrement dit, si le vendeur de NFT entend céder des droits de propriété intellectuelle (ce qu’il n’est pas obligé de faire), il doit le préciser dans les CGV.

L’étendue des droits cédés

En outre, l’article L131-3 du même Code impose que :

« les droits cédés fassent l’objet d’une mention distincte dans l’acte de cession et que le domaine d’exploitation des droits cédés soit délimité quant à son étendue et à sa destination, quant au lieu et quant à la durée. »

Concrètement, la clause relative aux droits de propriété intellectuelle dans les CGV devra donc comporter des informations sur l’étendue des droits cédés :

  • s’agit-il d’une simple licence de droit d’utilisation ? Ou l’auteur se dessaisit-il également du droit de reproduction, du droit de représentation, etc. ?
  • dans quel lieu le propriétaire du NFT pourra-t-il jouir de ces droits ? Pour combien de temps ? Et à quelle fin ?

Où faut-il intégrer ces CGV ?

Pour conclure, il est recommandé de placer les conditions générales de vente du NFT bien en évidence (conformément à l’article L211-1 du Code de la consommation). Avant que le consommateur puisse « minter » le NFT.

Il convient ensuite de les référencer dans ses métadonnées, qui pointeront elles-mêmes vers un site de stockage décentralisé, où pourra être stocké le hash des CGV.

Auteurs :

Abdoulaye Diallo, doctorant en droit et consultant dans la  blockchain et le RGPD.

Sonia Mavouna, avocate au barreau spécialisée en venture capital et droit des nouvelles technologies.

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